Le troc d’habits pour une mode éthique : L’Armoire sans fin cartonne à Tours

En plein confinement, pendant l’essor du zéro déchet, Marie Brugier développe L’Armoire sans fin. L’association propose d’échanger des habits contre d’autres lors de sessions de trocs, ou de les transformer au cours d’ateliers couture. Rencontre avec sa fondatrice. 

Chemisier rose avec des oiseaux, fines créoles assorties et bracelets de perles bleues et violettes, Marie Brugier prend une gorgée de son eau gazeuse et tranche de citron en terrasse. Fondatrice de L’Armoire sans fin, depuis octobre 2019, elle propose un système de troc de vêtements unique en Touraine. Par ce biais, elle souhaite transmettre et échanger des connaissances sur une mode éthique. 

Marie Brugier réfléchit à la création de l’association L’Armoire sans fin depuis le confinement (photographie : Dominique Andro).

« J’étais un garçon manqué très longtemps, au collège je m’habillais comme un sac… » s’amuse-t-elle. À l’université, elle se découvre une passion pour la mode. « C’est intuitif, je ne vais pas à la fashion week, je suis juste certaines personnes que j’aime bien sur Instagram. L’important c’est de se sentir bien dans ses fringues. »

Un projet né d’une démarche personnel

À l’origine du projet ? Une démarche personnelle : contrariée par la quantité de déchets générée à titre individuel, elle s’engage dans le zéro déchet. « Je réduis mes cosmétiques, je n’ai que 2 ou 3 produits pour l’entretien de toute la maison, j’achète le plus possible de vrac. » 

Depuis sa création, l’association a organisé une vingtaine d’évènements : trocs, mais aussi ateliers ou échanges autour de la couture. (Photo : Marie Brugier)

Quand cette sensibilité rencontre sa deuxième passion, la mode, elle dévore des documentaires sur la « fast-fashion » et ses conséquences. « En Europe, on se débarrasse du problème en envoyant les vêtements en Afrique, où ils n’ont pas les moyens d’absorber de telles quantités » s’indigne-t-elle. Au cours de ses recherches, elle découvre des systèmes alternatifs de troc en Amérique du Nord et en Angleterre. En parallèle de son emploi de secrétaire dans une association culturelle, elle crée l’association l’association l’Armoire sans fin en octobre 2019, s’inspirant directement de ces modèles. 

Pour aller plus loin : Marie recommande le documentaire La montagne textile : le fardeau caché de notre gaspillage alimentaire. (21min, WECF France) « Choquant, mais nécessaire pour comprendre les enjeux. » Il révèle le coût social et environnemental du commerce des vêtements d’occasion. 

À condition d’adhérer à l’association, chacun donne quelques articles (en bon état et propre) et récupère des points, en fonction de la taille du vêtement (1 point pour un tee-shirt, 4 pour un manteau…). Chaque adhérent peut ensuite repartir avec des habits de son choix, grâce à ses points. Depuis fin 2021, Marie, présidente de l’association, s’y consacre entièrement. Aujourd’hui, elle rassemble une quinzaine de bénévoles actifs et 85 adhérents. 

À Tours, il y a une vraie dynamique autour de ces questions de recyclage, de récupération.

Marie Brugier, présidente de l’armoire sans fin

« Je voulais faire quelque chose qui avait plus de sens ». Et le partage de compétences autour du réemploi du textile, par le biais d’ateliers et de « cafés couture ». Les ateliers, souvent thématiques  (prise en main de la machine à coudre, sauvetage de vêtements, « raccommodage visible » ), sont animés par des bénévoles et parfois des professionnels. Les cafés sont quant à eux des temps d’échanges plus informels, dans un troquet. En deux ans, l’association a organisé une vingtaine d’événements.  En toute humilité, elle partage ce sentiment de faire de son mieux, sans faire assez. « Cette impression de goutte d’eau, que quelle que soit l’alternative que tu proposes, tu es un petit colibri dans tout ça…» 

Lors des cafés coutures, des bénévoles ou des professionnels transmettent leurs compétences en matière de recyclage de vêtements. (Photo Marie Brugier)

La principale limite au projet aujourd’hui est l’absence d’un local, recherché activement par les membres de l’association. Pour l’instant, Marie stocke les vêtements chez elle entre deux trocs, et l’installation demande beaucoup de temps et d’investissement. Les événements se déroulent à l’auberge de jeunesse Étape 84 (Avenue Grammont), à la Maison de la Gloriette (Tours), ou encore à Le Dilettante (La Riche). 

À lire : en idée lecture, Marie conseille Mon dressing heureux, de Céline Séris (éditions Hachette Pratique). Le livre soulève les questions de pollution et de fabrication des habits que l’on porte. Sur son blog, l’auteure propose aussi des décryptages de marques. 

Pour la suite, Marie s’autorise à voir les choses en grand : « Si on trouve des lieux qui s’y prêtent, on pourrait faire des soirées projection de documentaires, suivies de débats. De la sensibilisation en milieu scolaire, des défilés, des happenings… » Dans l’idée de développer un lieu-ressource sur la mode circulaire. « À Tours, il y a une vraie dynamique autour de ces questions de recyclage, de récupération. » Avec toujours, au centre de la démarche, l’information et la sensibilisation : « L’idée n’est pas forcément de changer directement les comportements, mais surtout d’amener à la prise de conscience ».

Texte : Lisa Darrault, photographie de couverture Julie Gaucher

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