Cet atelier avait pour objectif de pouvoir échanger avec des acteurs permettant à des citoyens de se nourrir avec des produits de proximité. Nous sommes partis de trois initiatives représentées afin de chercher à comprendre en quoi ces projets sont innovants, s'ils sont facilement reproductibles et quelles difficultés ils rencontrent.
Nous avons commencé par un rapide tour de table des initiatives présentes
L'AMAPNE :
Créée par l'Association étudiante tourangelle pour la Protection de la Nature et de l'Environnement (APNE), cette AMAP étudiante permet depuis cette année à des étudiants de bénéficier de paniers de légumes toute les deux semaines, grâce une organisation adaptée aux problématiques étudiantes.
La Ruche Qui Dit Oui :
Cette structure implante des « ruches », gérées chacune par un responsable qui va trouver et sélectionner des producteurs dans un rayon maximum de 200Km (mais souvent moins). Les consommateurs peuvent ensuite commander des produits directement en ligne avant de venir récupérer leurs commandes en boutique, avec la présence d'un ou plusieurs producteurs afin de pouvoir échanger.
Le Petit Gibus :
Ici, ce sont dix producteurs qui ont décidés de se regrouper afin de proposer aux consommateurs une épicerie mobile proposant des produits locaux (transformés ou non) sur des marchés où dans des lieux convenus à l'avance. Il est nécessaire de faire sa commande par téléphone, excepté pour les marchés où l'acheteur peut choisir ses produits sur place.
Chacune de ces initiatives visant à donner l'accès à un mode de consommation qui n'est pas dominant (circuits courts), il leur à fallu innover pour trouver des fonctionnements adaptés à ce type de commerce.
Les AMAP sont aujourd'hui connues et présentes dans la pluparts des grandes agglomérations. En revanche, elles sont loin d'être adaptées au rythme d'un étudiant. L'AMAPNE s'est donc chargée de remodeler le modèle classique des AMAP afin de le rendre compatible avec ce nouveau public.
D'abord, les étudiants concernés ayant un budget limité, la taille des paniers a été réduite afin d'en diminuer le coût.
Ensuite, la durée d'engagement a été réduite à trois mois. En effet, du fait des nombreux stages et des vacances scolaires, les étudiants pouvaient rarement s'engager sur une saison complète.
Enfin, tous les étudiants n'étant pas adeptes de la cuisine, des efforts plus marqués que dans d'autres AMAP ont été fait afin de distribuer des recettes adaptées au budget et au temps accordés par les étudiants à la cuisine (notamment leu envoie par mail). De plus, il n'y a qu'un panier toute les deux semaines afin d'éviter tout gâchis.
La ruche qui dit oui, quant à elle, propose un modèle à mis chemin entre une épicerie et de la vente directe.
Pour commencer, elle soutient prioritairement les petits producteurs, d'ailleurs présents à chaque retrait de commande. Cela permet de faire le lien entre producteur et consommateur tout en évitant à chacun d'eux de faire trop d'effort pour trouver l'autre. C'est ainsi un gain de temps et un gage de qualité pour chacun d'entre eux : le producteur ne se déplace que lorsqu'une quantité minimum lui est commandée et le consommateur est assuré de bénéficier de produits de qualité puisque le responsable de chaque ruche vérifie qu'il s'agit de production biologique ou durable.
Après, elle permet aux consommateurs de commander en ligne directement depuis chez eux ce qui permet une consommation responsable sans pour autant changer ses habitudes concernant la manière dont ils effectuent leurs achats.
Pour finir, elle permet de redynamiser certaines zones puisqu'elle peut s'implanter dans des zones rurales généralement délaissées par ce type de commerce. Il est alors plus facile de créer du lien entre consommateurs et producteur ce qui est source de solidarité (récolte de fonds pour un nouvel investissement, aide ponctuelle,...).
Le Petit Gibus est sans doute un des projets les plus innovants puisqu'il s'agit de producteurs qui ont choisis de coopérer pour produire et écouler leurs productions plus facilement.
D'une part, le mode de vente s'est révélé être déjà original en tant que tel : c'est une épicerie paysanne mobile gérée par l'ensemble des 10 paysans. Ce mode de vente commun permet d'éviter à chacun de passer trop de temps à la vente, mais de se consacrer à la production qui est leur cœur de métier. En outre, cela évite toute concurrence mais crée, au contraire, une union alternative aux circuits de distribution de masse.
D'autre part, les produits proposés sont également inhabituels car certains sont transformés (pain,...), ce qui est rare pour de la vente directe. Cette auto-transformation permet alors de limiter les intermédiaires.
Lorsque l'on se pose la question du caractère reproductible de ces initiatives, il apparait qu'elles sont chacune adaptée à des besoins inhérents aux territoires sur lesquelles elles sont implantées. Si l'on désire les essaimer, on pourra alors se servir de ces exemples comme d'une base que l'on devra modifier en fonction des territoires sur lesquelles on les implante.
Il n'existe donc pas de modèle type, mais simplement des exemples desquels s'inspirer en les transformant plus ou moins. Ainsi, il a été mis en avant le fait que l'AMAP étudiante s'éloignait grandement des AMAP habituelles (soutien d'un producteur sur la durée, aide apportée à ce producteur,...), même si l'objectif d'origine reste le même. Les différentes ruches ont elle aussi un fonctionnement similaire entre elles, mais les producteurs étant différents à chaque fois, chaque ruche l'est également (obligation ou non d'une labellisation biologique, etc...). Concernant l'exemple du Petit Gibus, de tels projets existent également mais ne sont jamais réellement proches puisqu'ils dépendent entièrement des objectifs des différents producteurs. On retrouvera ainsi des groupements de producteurs qui ne font que vendre, tandis que d'autre produiront également ensemble.
La première difficulté évoquée lors de l'atelier est partagée par tous : la difficulté pour les producteurs de s'orienter vers une labellisation et vers la vente ailleurs qu'en grande surface. En effet, la ruche peine parfois à trouver des producteurs ayant une labellisation biologique (ou s'en rapprochant) et la vente à des grossiste est pour eux un gain de temps. La raison de ce manque d'engouement pour les labels, c'est que leur obtention est couteuse en temps et en argent. Les paysans du Petit Gibus effectuent la même remarque puisqu'ils n'imaginent obtenir un label qu'une fois leur projet bien démarré.
Le deuxième frein est en réalité un prolongement du premier : puisque les ruches devant choisir des producteurs non labélisés, il leur incombe de les contrôler. Or, contrôler le mode de production est très difficile du fait du nombre important de producteurs, d'où la nécessité de se faire confiance.
Le troisième frein concerne l'AMAPNE, qui ne parvient pas encore à créer de vrai lien de solidarité producteur/adhérent et à impliquer ces derniers dans l'association. Cela est dû tant aux producteurs qui ne partagent pas l'essence de l'AMAPNE qu'aux étudiants qui se contentent d'une relation de consommateurs. Cela amène à se poser la question : l'AMAPNE peut-elle être qualifiée d'AMAP si elle se limite à la mise à disposition de paniers de légumes ? Les personnes présentes restant en mitigées sur la réponse, le débat reste ouvert.
La dernière difficulté est le caractère élitiste des personnes membre de ces structures : ce sont des consommateurs déjà sensibilisés à la question des circuits courts. Une participante avance pour raison le prix plus élevé des produits proposés qui ne correspond pas à des budgets modeste. Toutefois, après débat, tout le monde est tombé d'accord pour dire que c'était plutôt un problème de culture et d'éducation : acheter bio ne coute pas plus cher, pourvu que l'on n'achète pas en grande surface et que l'on cuisine les produits sois même.